On croît connaître, on y a déjà accompagné des amis, regardé les villas en faisant la planche plage de l’écluse … Mais Marie-Hélène, notre excellente guide de l’Office du tourisme, et nos deux mentors, Odile Canneva-Tetu et Jean-Pierre Mandart, nous en ont fait revivre l’histoire, à travers l’architecture et les personnages extraordinaires qui ont « inventé » la station balnéaire.
Dinard est né avec ce que le sociologue Alain Corbin appelle la « naissance du rivage ». Plus concrètement, c’est l’initiative individuelle d’une grande famille anglaise, les Faber, qui est à l’origine de la transformation d’un village de pêcheurs dépendant de la paroisse de Saint Enogat en une villégiature cosmopolite fréquentée par une pléiade de gens fortunés, aristocrates, grands industriels et même têtes couronnées.
Les ZPPAUP, zones de protection du patrimoine architectural, urbain et paysager, ont été mises en place en 1983 par la loi de décentralisation dite loi Defferre. Dès l’année suivante, afin de protéger villas et immeubles des spéculations immobilières et des destructions, une ZPPAUP vit le jour à Dinard et 400 édifices furent inscrits dans le périmètre soumis à protection. Dinard méritait cette mesure.
De la Pointe du Moulinet à celle de la Malouine, d’immenses villas de style éclectique sont construites du milieu du XIX e siècle au premier tiers du XXe. Elles sont ouvertes vers le nord, c’est-à-dire vers la mer, les iles, Saint Malo, par des bow-windows, des fenêtres à guillotine et parfois, comme aux Roches brunes, d’immenses terrasses. Cette implantation, essentiellement anglaise à l’origine, s’accompagne de constructions indispensables aux occupations de cette société et dont il reste des témoignages : casinos, établissements et cabines de bains, hôtels, église anglicane -la seule qui subsiste dans l’ouest- et clubs sportifs dont le yachting club que l’on doit à l’architecte régionaliste Yves Hémar.
La crise de 1929 a des conséquences immédiates à Dinard, désertée par les anglo-saxons. Une importante population domestique, autrefois logée dans des communs parfois très élégants, perd alors son emploi. C’est un tourisme plus populaire qui se développe après-guerre, plusieurs villas sont transformées en hôtels ou divisées en appartements, même si quelques capitaines d’industrie continuent de s’y implanter tel François Pinault, acquéreur en 2013 de l’étonnante villa Greystones construite par Roux-Spitz pour lui-même en 1938. Une autre « colonie », celle des intellectuels et des artistes, a construit des maisons plus modestes à Saint Enogat.
Ceci ne pourrait-il faire l’objet, pour l’AMEBB, d’une autre exploration allant, pourquoi pas, jusqu’à Saint Lunaire et Saint Briac ?
Marie-Jeanne Yvinec (Crédit photo Alain Amet)